Ecrit le 08.07.06 à 21h20
-« Tu es trop… »
-« …trop quoi ? »
-« Trop…tout ! »

Pour la première fois de ma vie j’ai réussi à jouer ce putain de clair de lune chiant et répétitif jusqu’au bout. Sûrement parce que je pensais à lui. A ses doigts sur le piano, si délicats et raffinés, incrustés dans la touche, fondus et légers. Léger et fondant. Velouté. Voluptueux. Mais surtout, romantique et fleur bleue. Il est si sensible dans le fond. Dans le tréfonds. Vous savez, sous la couche de protection.
Il s’était assis au piano et avait commencé à poser les premières notes de ce même morceau, je m’étais aussitôt exclamée :
-« Clair de Lune, beurk, il est vraiment pourri celui là ! »
Blond me dira plus tard :
-« C’était le seul morceau que je savais correctement jouer, mais quand tu m’as dit que tu ne l’aimais pas, je ne savais plus quoi faire…J’en ai perdu tous mes moyens. »
Je fais toutes les gaffes qu’il faut.
N’empêche, qu’est-ce qu’il jouait bien. Cent fois mieux que moi. Lui dit qu’il complexe vis-à-vis de moi, mais c’est tellement réciproque, ce sentiment d’infériorité mêlé à l’admiration artistique. Je me rappelle encore ce jour où il m’avait avoué que je l’avais influencé à un point tel qu’il se posait des questions quant à son choix d’instrument. Et si finalement il ne lâcherait pas tout ce qu’il avait acquis à la guitare pour le piano. Pour que je le coach, comme je le lui ai promis lors de ce mail où j’écrivais :

« Je pense que tu ne saisis pas à quel point je suis admirative de ce que tu fais. Peut-être parce que c'est une admiration affective, passive et discrète. Et comme tu n'acceptes pas mes compliments, je vais te les écrire. Les preuves par écrit, tu sais. Parce que moi en face de toi, ça tombe sous le sens que je ne peux pas t'en dire du bien, même si j'essaye, ça me déchire le coeur. Je crois que le mode de vie "qui aime bien châtie bien" employé à outrance est d'un très mauvais effet. Bref, j'emmerde tous les gens qui disent que Blond pète plus haut que son cul.

Parce que ton attitude envers la musique est la plus humble qui soit. Ton visage si tendre et tes doigts qui font gaffe à ne pas malmener ton instrument m'ont touchée. Et tu me mets encore une claque, parce qu'il va falloir que je me remette en question quant à ma façon égocentrique de jouer. Fais chier la bite, merde. Ah tu fais pas ton malin, devant un piano. Tu as trahi ta sensibilité profonde, je t'ai vu, là. Là, à quel point tu avais du coeur. Dans ta manière d'aborder les choses, je l'ai senti dès que j'ai entendu tes notes, même au loin, même sur un Clavinova vieux de dix ans, même debout juste trente secondes. Il faut que tu te rendes compte que c'est ça qui importe, que c'est le respect de la musique et l'humilité qui te feront progresser rapidement. Je ne peux pas t'en dire plus, c'est inscrit comme ça. Je crois en les gens qui ne croient pas en eux. Ou qui du moins, ne se croient pas plus fort que la matière musicale. Et je ne veux pas que tu changes. Ni que tu t'éloignes de moi.

Tu vois, quand tu es devant un piano, je remarque l'être qui joue plus que ce qu'il joue. C'est totalement paradoxal face aux impressions que je t'avais transmises sur tes prestations à la guitare. Comme quoi, finalement, l'instrument compte. Ca ne va pas te faire plaisir, mais tu as peut-être une âme de pianiste. Tu as un touché particulier, à fleur de peau. Sur ton piano robuste, tu es un romantique. J'avoue, j'avais imaginé avant même de t'avoir entendu, pouvoir être scotchée face à ton déduit talent. J'ai juste été énormément attendrie devant l'enfant que j'avais à mes côtés. Je n'en reviens pas moi même d'avoir à te dire cela, mais tu es si pur...En une seule après-midi, j'ai accumulé tellement de choses à te dire sur ton toi artiste, et profond également. Et j'aurais envie de ne te montrer à personne, parce que j'ai découvert quelqu'un de rare. Te garder pour moi et te coacher pour que tu progresses. Mais pour ça, il faudrait que j'aie quelque chose à t'apprendre. Je ne possède rien, à part mon affection cynique et sadique à te donner. C'est maigre, comme héritage. Et c'est marrant, je ne te fais de déclarations que par écrit. Sûrement parce que je n'ai pas envie de voir ta tronche quand tu liras cela. Parce que oui, je dois bien avoir peur de tes réactions. M'en fous je t'emmerde. »

Oui, c’est devenu une habitude de lui écrire ce genre de roman. Blond m’avait dit qu’après avoir lu cela, il avait déprimé dans son lit pendant deux heures. Personnellement, je ne vois pas pourquoi…

Je l’aime si fort. J’aime tout de lui.
La première fois que je l’ai vu entrer dans la salle de classe, j’ai pensé qu’il était l’homme de ma vie, dû à son physique totalement en accord avec mes goûts. Toutes ses attitudes, ses mots qu’il me sortait, ses crachats d’humour, tout ça restait encré si profond en moi. Quand j’ai commencé à le connaître, je n’en revenais pas qu’il puisse être un homme si attirant mentalement parlant. Si fin et vif, perçant. Parfois il me regardait pendant que je disposais mes mots à lui et j’en perdais la suite de ma phrase, tellement j’étais troublée. Puis quand il s’est confié à moi, je me suis rendue compte qu’il n’était pas que beau et intelligent, mais qu’il avait également un grand cœur. Et une sensibilité cachée, à fleur de peau. Je me suis alors posée la question…que demander de plus ?

L’osmose. Et la fibre artistique que l’on partage au-delà des mots, que l’on capte jusque dans nos veines et qui fait frissonner son bras tant de fois. Il est génialissime. En tout, il est si doué, et si peu arrogant sous sa carapace. J’ai du mal à concevoir que ce genre de personne existe. J’ai du mal à lui trouver des défauts. Il est si attachant…