Quand le matin est arrivé dans les chaumières, j'avais la nette sensation de fin de rêve, fin de miracle......une petite intuition qui me dit que tout était redevenu comme avant. Maro finit son bouquin, les autres se préparent et s'en vont, et moi je suis de plus en plus amoureuse. A chaque minute. D'ailleurs, à la minute où je vous parle, je le suis encore plus qu'avant. C'est prouvé scientifiquement.

Nous ne sommes finalement plus que tous les deux et j'ai du mal à refouler mes ardeurs de passion flamboyante à son égard. Alors je regarde le ciel. Il fait soleil. Mais moi je me rappelle ces gouttes de pluies qui ont enchanté ma vie durant un court instant nocturne. J'aimerais qu'elles reviennent, sans toutefois avoir à me mouiller dehors. C'est pareil pour tout. On veut que ça nous tombe dans la main, mais on ne veut pas se mouiller. Et je ne compte pas rester éternellement fermée dans cet état d'esprit. Je voudrais tellement qu'il s'approche de moi pour me serrer dans ses bras, qu'il vienne de lui-même......mais comme je l'ai dit plus haut, je dois faire les choses de ma propre initiative.
Je le regarde lui et sa guitare. A composer du non-sens-20e-degré. Lui, son orage, et sa folie des grandeurs. Avec le ciel qu'on a aujourd'hui, il risque pas de pleuvoir. Par contre toi, Maro, t'as les yeux qui brillent d'une manière étonnante ce matin.

Il fixe les miens, au moment précis où je pense à la phrase juste avant, et avec une voix méga-sarcastique, m'envoie son meilleur :

-"Quoi?" (sous-entendu : Qu'est ce qu'il y a? Qu'est ce que tu veux? Pourquoi tu me regardes comme ça?" et un tas d'autres questions débilement provocantes)
-"Je veux un câlin."

Argh....ça y est, je lui ai finalement avoué. La perdition approche...

Lui de son côté, égal à lui-même, bredouille un tas de trucs dans un langage inconnu au bataillon. Honte à moi, j'aurais du prendre Maro comme deuxième langue au collège.....je m'en mords les doigts à présent. Il bredouille, bégaie et bafouille, ça fait beaucoup de mots en B tout ça....et avec son sssseveux sur la langue, dur dur de tout décoder. Enfin toutes ces choses pour en venir au but : pas de gâtés maintenant, mais peut-être qu'après.....
Après....

Ouais ! Il croit vraiment que je vais l'attendre toute la journée ? Que je vais me mettre à sa disposition, m'accroupir pour ses désirs? Patienter jusqu'à ce que Môsieur daigne faire son acte de bonté ? !
Ha Ha Ha Ha!
.....
....
.....ce que je fis, bien évidemment.

En mon fort intérieur, je pensais être tombée bien bas. Je me torturais la vue en continuant à poser mes yeux sur lui, et m'auto-lapidais de quelques mots bien taillés : "pffff Dine, t'es nulle, arrête ça tout de suite."
Mais c'est Maro qui vint m'infliger le coup final, en me sortant une heure après, son fatidique :

-"Quoi ?"

Beaucoup plus recherché phonétiquement que le premier.

-"Beeeen.....toujours pareil..."

Lui répondis-je.

Et là, le clou du spectacle, Ze phrase mythique de l'homme qui n'en a rien à battre :
-"Bah.......y'a des peluches....." (sous entendu : tu sais ce qu'il te reste à faire, pauvre fille)

 
Et Maro mène encore la danse.
Il anticipe mes réactions à merveille (enfin, la plupart du temps). Il parie, il gagne. Il me manipule. Il se joue de moi.....et il prend son pied ! Je suis son pantin préféré. Il adore s'amuser avec mes sentiments. Et oui, c'est qu'il est joueur, le petiou. Puis moi, je le laisse tranquillement faire mumuse.....je ne devrais pas. Mais si ça lui fait plaisir...

Bon sang, mais comment un gars aussi attentionné la nuit peut-il arriver à être aussi insensible le jour suivant ?
C'est ça, le paradoxe Maro.
On croit que c'est gagné, et puis hop, BoUm ! C’est le carnage, le daim soudain, se relève pris de rage.
(Oups pardon, on dérive du sujet....)

Enfin, tout ça pour dire que le coup des peluches est incroyable quoi! Comment un homme peut-il refuser avec autant de dédain un gâté avec une aussi jolie nana (quand vous lisez dans cette phrase le mot "jolie", vous êtes censés l'identifier à Dine....non je le dis comme ça, au cas où....) ? Ca me dépasse, vraiment !
Cet homme est imperturbablement fort. Il faut qu'il me donne des cours, c'est urgent. Qu'il m'apprenne sa méthode. Moi aussi je veux obtenir ma maîtrise en manipulation amoureuse. Je veux pouvoir contrer les attaques, faire la fille qui n'en a rien à foutre. Moi aussi je veux jouer. Entrer dans la danse. Parce que le mieux, quand même, c'est de jouer à deux, tu ne trouves pas Maro? Je vais te dresser, il va bien falloir un jour te remettre en place. Je veux être la fille qui t'ouvrira les yeux. J'en ai marre de rester celle assise sur le coin du lit, à qui on dit "Bah.....y'a des peluches...." avant de quitter la pièce. D'ailleurs, à l'entente de ces mots, j'ai eu vite fait de retrouver mes esprits, jusqu'à me demander : "Mais qu'est ce que je fous encore là?"
J'ai alors rassemblé toutes mes affaires, les ai bouclées dans mon sac. J'avais la haine. Ca me démangeait partout dans le corps. Sur le pallier de la porte d'entrée, j'avais envie de sortir un :

-" Au fait, j'ai pété dans ta chambre. Je me suis bien débouché le cul puis j'ai bien pris soin de vite refermer la porte après mon passage."
Mais ça perdait de son glamour. Alors je me suis juste contentée d'un :

-"Au revoir..."

Je ne baisserai pas les bras de sitôt.

Fin