Ecrit le 12.11.07 à 23h50

S’il te plait Ryne, arrête d’en parler, ça fait vraiment trop mal.

Toutes ces images qui s’inventent, elles sont si belles. Si joliment irréalisables.
Elles se matérialisent assise dans le métro, dehors à marcher avec ses musiques dans les oreilles, dans le lit, dans la douche, en mangeant, en public ou bien seule. En toutes circonstances, elles sont là pour me rappeler que je l’aime à la folie, que c’est comme ça, que je fais plus avec que sans et que je m’en porte….. Que ça m’emporte dans une euphorie interdite dans le présent. Mais je suis sure que….je suis sure que le présent, ça ne dure pas si longtemps que ça. Et que bientôt, ce ne sera plus uniquement des images collées dans un coin de mémoire.
C’est comme ça.

Je l’aime.
Je visualise sa main qui agrippe la mienne dans la foule de Corse. Et je frissonne à nouveau. Je me dis que cette main, s’il l’avait cherché, c’est qu’elle était un peu importante pour lui, non ? Un peu plus que les autres ? Je ne me rappelle pas l’avoir vu prendre la main de quelqu’un, à part peut-être celle de Rat son ex et unique, et encore. Est-ce qu’il se débrouille toujours pour ne pas laisser de preuves ?
Une main, c’est perturbant, faut pas croire.

J’ai d’autres scènes en tête. Et tous ces détails qui ne lui échappaient jamais. Je changeais un petit truc dans mes habitudes, et il criait au scandale à l’autre bout de la salle. Un léger brillant sur les lèvres, ou du brun sur les paupières, une jupe je n’en parle même pas. Je n’étais pas encore entrée dans la pièce qu’il l’avait déjà remarqué et me faisait les signes au loin du constat, la voix ne portant pas à cette distance. Comment fait-il ? Ca doit être son super 14 à l’œil droit qui lui donne des pouvoirs de vision supersonique. Enfin j’en sais rien. Je me rappelle juste un après midi d’été où l’on s’était baigné ensemble, lui et ses copains « d’enfance ». On avait profité d’un relâchement d’ambiance pour aller s’éclipser sur ce banc dans l’allée, le soleil tapant sur le bois, on avait parlé d’amour. J’avais a peine posé les yeux sur lui qu’il s’était arrêté pour me demander ce que j’avais fait à mes cils.
-« Tu as mis du mascara ? Ils sont plus longs et plus épais. »
Un homme, ça ne sait pas que l’eau de la piscine en est la cause. Un homme, ça ne fait pas attention à ce genre de petits trucs sans prétention. Est-il un homme ?

Il y a des détails qui ne trompent pas. Que ce soit par la vue, le toucher ou l’odorat.
Je me souviens de cette seule fois où il m’a laissé entrer chez lui. Le matin, il n’arrêtait pas de se plaindre :
-« Et voilà, maintenant, tu vas laisser ton odeur partout dans ma chambre ! »
Il ne voulait pas que je touche à trop de choses à cause de ça. Ca dérangeait monsieur qui désirait un espace sain rien qu’à lui.
Mais lorsque je suis revenue de la douche, lorsque je lui ai poliment rendue la serviette qu’il m’avait prêté et ai quitté l’embrasure de la porte, j ai hésité un instant avant de revenir sur mes pas. Il était là, assis, ma serviette de douche collée contre son nez, à respirer les yeux fermé. Il a dit qu’il s’essuyait le front parce que jouer de la guitare l’avait fait transpirer, et je me suis moquée de lui. Le front, c’était quand même un peu plus en haut. Je n’ai pas osé lui faire la remarque…

Je me souviens de tous ces moments et je me dis que ça ne peut pas se terminer ainsi. Que tout ça, c’était il y a un an, et que je me dois de faire perdurer. Je ne fais qu’attendre. Attendre des moments comme ceux là. Revivre des voyages en Corse. Lorsque je lui demandais timidement dans la tente si je pouvais lui prendre la main pour m’endormir. Que j’avais le droit. Que je puisse la serrer tout contre moi en fermant les yeux, et entendre :
-« Mais, c’est quelle partie du corps que je touche, là ? »
-« Eh oh, te fais pas d’idées, c’est seulement mon visage ! »
-« Je ne pensais pas à ça ! C’est juste que… »
-« …que quoi ? »
-« C’est juste qu’un visage, ce n’est pas si doux en temps normal… »

Je l’aime. Est-ce que vous comprenez ?