Ecrit le 21.04.10 à 16h10
Bon….ça ne se passe jamais comme convenu. On a des certitudes, des convictions et des projets, mais tout ça c’est pourri vis-à-vis du reste. Enfin, du cours des choses. Le soir même Ice m’appelait pour me dire « quel con, pourquoi est-ce que je ne t’ai pas demandé de monter avec moi » et puis moi j’ai acquiescé « c’est vrai, quel con, j’aurais eu envie de venir en plus ». Deux jours après il venait me chercher à la gare.
Ecrit le 25.04.10 à 01h55
C'est à peu près le début. J'étais encore dans le train que je me demandais toujours "mais pourquoi est-ce que je suis avec ce type? C’était de la pure folie." Parce qu'à part ce que j'ai pu voir dans ses yeux, le reste ne me convenait pas du tout. Toutes ces parties d'êtres que je croyais avoir abandonné ou dépassé, du genre, savoir ce que l'on ne veut pas, à défaut de savoir ce que l'on veut, c'était au moins ça de gagné. Eh bien non, rien n'est acquis ni gagné. Rebelote. Les mêmes rengaines insupportables. Et encore, ça s'il le faut je peux gérer, minimiser les doses, modérer les refus intérieur, se blinder face au poison douloureux. Il y avait des endroits, des situations que je ne voulais plus avoir à revivre. J'acceptais de m'y confronter avec prudence et parcimonie si c'était pour lui, en tentant un maximum de rester extérieure au contexte, comme si je n'étais déjà plus là. Sauf que le contexte m'attaque et détruit mes défenses en une seule vague. Vlan, tout dans la face. Alors ça non. Accepter que l'autre se détruise est un fait, qu'il en vienne à nous atteindre en est un autre. J'avais dit non, non, non.
Mais bon, est-ce que ça compte.
C'est peut-être Ice en premier qui a dit le Non le plus fort. Face à la mienne, d'autodestruction. Au final, lui comme moi nous nous retrouvons sur le même navire, le même naufrage. On a chacun vis à vis de l'autre des vieux cauchemars refoulés qui nous sautent à la gueule lorsque l'on est côte à côte. Si d'ordre général le plan négatif est supérieur au positif il n'y a pas de raison que l'on s'échine à vouloir être heureux, autant le faire ailleurs on y parviendra bien plus vite. Sauf qu'il y a ses yeux. Ce truc que je n'ai jamais vu nulle part. Cette proximité claire et profonde dans ses pupilles, depuis combien de temps nous connaissons-nous réellement? Je ne le côtoie pas suffisamment pour être attachée ni encore amoureuse, pourtant je me souviens de nos premières rencontres, la douleur qui saisissait mon ventre lorsque la distance se réduisait, un malaise et une mélancolie rare d'oser le regarder, m'être présentée à son visage, comme s'il me rappelait d'anciens souvenirs et rouvrait des plaies, remontait cette sensation de l'avoir toujours aimé et d'en avoir profondément souffert. Il y a des bouts de nous que l'on n'a probablement encore jamais démêlés. Parfois ce sont des gestes tout simples. Effleurer mon nez contre le sien, lentement, rapprocher nos lèvres sans s'embrasser, juste sentir l'air épais et dense de désir qui sépare nos deux bouches du baiser, tous ces instants sont très familiers, ceux là surtout, ils s'insèrent avec naturel dans une habitude complice, alors que c'est la première fois avec quelqu'un, dans cet instinct là il est censé n'y avoir ni enclin routinier ni aisance et pourtant. C'est là, comme une longue évidence.
Au départ l'évidence elle était dans ses yeux. La raison de l'entorse à la règle. Et puis au cours de la semaine j'ai compris pourquoi le reste. J'ai pu saisir l'autre dimension, celle plus humaine. Braquée sur ses défauts j'avais omis ses qualités énormes et inconditionnelles, celles que j'avais pu déceler le premier soir au fond de son regard, qui est j’en suis persuadée la clé de tout, toutes ces choses, la clé de nous deux.