Ecrit le 01.10.11 à 01h35
Tu avais si peur de me faire souffrir que j’ai dû t’affirmer pouvoir discerner ce dont j’étais capable d’endurer ou non et savoir y mettre un terme avant que ça ne devienne une douleur plus forte que moi. Eh bien. C’est au téléphone, dans le bus du retour ce soir, lorsque m’est venue la boule au ventre à t’entendre parler d’ailleurs. C’est là que je me suis vue subir la situation, prendre sur moi et ravaler mon amour en même temps que mes phrases. Je me suis dit non, pas encore. Pas cette position là. Je la connais trop bien. J’ai pensé qu’on était en train de franchir la limite de ce qu’il m’était permis d’accepter. Je n’y arrive plus. Je ne peux plus gérer les aléas de nos cœurs polyglottes et garder le sourire.
Alors je me suis excusée du moment mal choisi. Et j’ai dit viens on arrête. Moi de toute façon je ne peux plus. Tu n’es à moi ni par la pensée, ni par la présence. Tout se partage, c’est juste que ma part du gâteau est plus petite. Alors je râle. J’envie les autres, je me dévalorise. Et je sais que ce n’est qu’un scandale pour une part de gâteau mal tranchée. Un caprice. Je ferai mieux la prochaine fois, peut-être.
En gros, pour pouvoir faire mieux, il faut une prochaine fois. Tu comprends? Je ne vois pas de dénouement favorable à cette histoire. Je suis blessée, mon sentiment comprimé avec mon envie d’y mettre du mien, je n’ai plus le courage d’essayer. Ce n’est vraiment pas de ta faute, et c’est un peu de la mienne. Je le reconnais. Aujourd’hui, j’en souffre. Et comme je te l’ai promis. Avant que la douleur ne soit plus forte que moi, restons-en là.
Ne m’appelle plus, avant que je ne change d’avis. J’ai ce souhait en même temps qu’un regain de motivation de passer à autre chose, comme un éclair. Alors, tu sais ce qu’on va faire? On va aller dormir. Et demain matin au réveil ce sera un nouveau jour qui commence. Une belle page blanche et tout à y faire comme pour une première fois. Ce sera un grand terrain vague et l’apaisement de n’y voir rien qui dépasse. Ni cabane, ni building, ni villa. Rien, anti-construction. M’assoir, prendre une pause un instant et regarder le vide. Dans le blanc des yeux. Blanc. Tout serait blanc. Sans couleur. Sans nuance. Sans complexité.
Et qui sait, je m’entendrai peut-être respirer.
Commentaires :
Re:
C'est très vaste une première fois. Il y a beaucoup de nuances. Par exemple, une page blanche dans un cahier. Cette page blanche à remplir, cela pourrait être la centième, et ce qu'on y écrit dessus, même s'il y a tout à y faire, ce n'est pas anodin. On peut choisir de ne pas continuer l'histoire, d'ignorer les 99 pages précédentes et poser quelque chose de neuf, il n'empêche qu'elles existent, il n'empêche que cette centième page est reliée aux autres, et qu'ensemble, elles forment un livre. J'aurais aimé commencer un autre carnet, par le début. Ou alors déchirer une page. Me dire qu'elle est la seule, et que c'est la première fois que j'en frôle une. Ne jamais avoir fait le geste de construire. Sans acquis. Sans réflexes.
Ils sont gentils tes mots. Alors merci. :)
Petite, je voulais devenir mangaka. Je remplissais des feuilles et des feuilles d'histoires dessinées, je faisais de toutes ces pages blanches des tomes à multiples suites et puis j'ai appris les arts appliqués. A un moment donné, la vie a pris un tournant. J'ai su que moi aussi. J'ai finalement choisi la musique.
En haut à droite il y a une image avec un lien, si tu veux écouter.
Re:
Je me retrouve souvent face à une page blanche d'une histoire à débuter, trop souvent. Le carnet que je tiens est parsemé d'histoires qui se terminent en ayant à peine commencé. Aucun livre terminé, aucune fin d'écrite, le point final est apposé par l'autre, sans dénouement, sans compréhension, au milieu de tout, ou de rien.
Des débuts sans fin, y en a qui aiment ça. Comme si ça les dédouanait de toute souffrance... Peut-être est-ce une volonté de ne pas s'impliquer avant que ça ne compte vraiment ? Je ne sais pas.
Je suis d'accord avec toi, que ce n'est pas anodin, remplir la page blanche, quel que soit son nombre.
Mes mots essaient d'être le reflet de ma pensée, voire parfois ce que je suis vraiment, imparfait, maladroit, mais j'essaie de ne faire de mal à personne.
J'écris ce que je pense, sincèrement. Et te lire, ce que j'en ai lu, me plait. :)
Re:
Et le vide des pages non remplies? Le vide de tous les possibles et celui de l'espoir qui continue à tourner, comme une bobine de film sans image? Tu ne trouves pas cela encore plus vide? Un inachevé, encore plus triste qu'une simple fin?
Parfois, en prenant trop à coeur de ne faire mal à personne, on en fait les mauvais choix.
La souffrance, ce n'est franchement pas aussi grave qu'on s'évertue à nous le faire croire.
(c'est français ça? bizarre)
Merci de me faire partager tes pensées sincères. Cet endroit est là pour ça. Pour me confier, et inciter les autres à s'ouvrir.
Je trouve ça à la fois magnifique et désespérant, une page blanche. On a tout à y écrire, et on ne sait pas par où commencer, ni quand, d'ailleurs, on va commencer .
Tu disais, "tout à y faire comme pour une première fois." C'est toujours une première fois, à chaque fois c'est différent. Et ça ne commence jamais pareil, et on se pose pas la question si on se cassera les dents ou pas, y a pas de souffrance, y a pas d'espoir, y a la curiosité, la simplicité.
Sans te connaitre, juste en ayant lu, au passage, des textes qui m'ont plu, je me suis attardé. Et ça a une certaine valeur ça (pour ce que ça peut valoir).
Je m'arrêterais pas, si ça n'en avait pas. Ne te dévalorise pas. Écrire ainsi est quelque chose de beau, déjà.
(ça n'a rien à voir, mais pourquoi Mangaka(dine) ? Tu es dans le manga ?)