Les gens s'en fichent parce qu'ils ne voient pas. Ils ne peuvent pas t'ouvrir et disséquer ton intérieur pour comprendre. Ils ne peuvent pas savoir si tes couleurs sont comme les leurs et si le bleu de chez toi c'est le même bleu que celui de chez eux parce que personne sera jamais dans tes yeux, ni dans les autres. Ils ont que les mots pour faire des rapprochements approximatifs en espérant que oui, il y a peut-être un lien. Mais les sentiments, c'est même pas une couleur. C'est même pas un truc qu'on pointe du doigt. Parce qu'on aurait pu dire unanimement "ça c'est bleu" même si on y voyait chacun quelque chose de différent. L'amour c'est juste.

Une énorme chance, oui.

Quand je vois ceux qui ne savent même pas que ça existe. Comme des aveugles. On pourra leur parler toute leur vie de couleurs, ça restera uniquement théorique, voire imaginaire. Un joli conte de fée. Tu sais, toi, que ce n'est pas un conte de fée. Tu l'as vu. Tu l'as senti. Tu l'as eu dans tes pores et oui, ça t'a fait mal. Ca t'as fait mal parce que tu l'as vécu et que tu as eu cette chance. Et ce vide dû à son absence, tu le comprendras. Il a du sens. Il est moins facile à accepter, mais il se supportera toujours mieux que l'absence de choses à aimer. Le vide dû à rien. Rien du tout. Parce qu'il n'y a rien. Une vie de rien. Soit heureuse d'avoir pu aimer quelqu'un aussi fort et de cette manière. T'as égayé quelques unes de tes secondes mais ce serait une erreur de penser que t'as pourri les autres. Celles à suivre, elles t'attendent. Ne les perds pas à pleurer. Tu te fais du mal. Les autres s'en foutent. A quoi ça sert? Ce n'est pas un tunnel sans fond ni sortie. Ne t'y enferme pas, je t'en prie.

Ne l'impose pas aux autres. Ceux qui font des efforts pour aller de l'avant malgré tous ceux qu'ils ont en eux. Tu ne les vois pas. Mais ce n'est pas parce qu'ils n'en parlent pas qu'ils ne ressentent rien. Le bleu, il sera toujours présent, qu'on pose des mots dessus ou non. Il est autant présent pour toi que pour certains. Même s'il y a des gens qui s'en foutent. Des autres. Même si au fond toi aussi.
Je ne veux plus te voir pleurer.
Tu serais capable de dire que je n'ai pas à vouloir, et que de toute façon tu ne peux rien faire contre ça.
C'est de la faiblesse, bien sur. Et non pas le malheur qui est trop grand. La douleur, elle est énorme parce qu'elle est autocentrée. Tu sais, ça fait du mal. Te voir souffrir de la sorte et refuser les prescriptions. Evidemment qu'il n'y a pas de médicament miracle pour te soigner. Evidemment que tu vas devoir faire tout le boulot. Mais ne te détruis plus. Parce qu'à part les aveugles, et même si personne ne pourra jamais aller dans la tête de l'autre. Tout le monde voit le bleu. Tout le monde voit les couleurs. Et moi je te regarde. Et en ce moment, je vois plus de douleur que ce que je vois d'amour. Ca n'a pas de sens la fatalité. Préserve tout ça. Et au lieu de le garder pour te griffer avec ce truc trop grand pour toi, donne-le aux gens. Pas pour t'en débarrasser. Mais pour partager. Et tant pis s'ils ne comprennent pas. Si au lieu de les éloigner de ta vie, tu peux les faire sourire.
On ne saura jamais celui qui avait l'amour le plus vrai, le plus honnête ou le plus intense. Après tout, on ne peut pas juger. Tout simplement parce que c'est impossible d'entrer un instant dans les yeux de quelqu'un, ou dans son cœur. Alors, qu'il t'ait aimé ou pas, et à quel point. Malgré les gestes, les décisions ou ce qu'il a pu dire, tu ne peux pas. Tu ne peux pas. Tu peux juste imaginer, comme une aveugle. Pourquoi s'attarder là dessus. Je suis en train de perdre le fil de mes pensées alors je vais répéter ceci.

Quand on a autant de choses que toi qui brulent à l'intérieur. On s'ouvre. On donne ce qu'on a, on transforme les saveurs et on les fait goûter à chacun. Parce que comme ça les gens pourront un instant comprendre ou au moins se rapprocher et moins s'en foutre. Et parce que plus on donne, plus on se sent léger. Peut-être qu'à la fin il ne restera que les beaux moments et même plus de regrets. Peut-être que ce sera un sentiment reposant de satisfaction d'avoir vécu. Un petit bout de vie avec quelqu'un.  Et puis avec le reste aussi, si tu donnes. Donne de ta grisaille en le transformant en bleu. N'attends pas des autres qu'ils te donnent ce que toi tu as à leur donner. Parce que tu as beaucoup.

Ne gâche pas tes moments présents.