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Qui sent la noisette
--> Démêler ses mêches blondes

Ecrit le 23.05.11 à 02h00
Je rêve souvent en ce moment. Des songes ambigus qui me laissent un goût de perplexité quant à leur sens. Est-ce des signes bénéfiques où me ferais-je mener en bateau par ma symbolique propre? Je n’arrive pas à cerner si l’instant est empreint de force ou si je me mens à moi-même. Et j’aurais plutôt tendance à me méfier de ma personne par les temps qui courent.

Il n’empêche que j’étais entre autres facteurs bordéliques encore à un de ces concerts, dans une salle où il va souvent et je ne me souviens plus comment mais les faits s’enchaînant je me retrouve à marcher seule avec lui sur des sentiers un peu plus ruraux que d’ordinaire. Même dans mes rêves nos langues n’osent trop s’user par les mots et l’échange reste très timide, chaque phrase se prononce avec réserve et parfois le vent l’emporte plus vite que la musique et je me dois de répéter, non sans gêne de dire la même connerie une deuxième fois. A sentir cette brise rafraichissante et les feuilles des arbres frissonner j’ai une envie profonde qui remonte à la surface, une lubie que m’a évoqué Morphée. Grand Fou et moi avons dorénavant grimpé sur un muret scruter l‘horizon des hauteurs, et alors que le vent nous souffle des berceuses à l’oreille nous continuons de discuter et se rapprocher prudemment l’un de l’autre, au fil de la conversation il m’arrive de passer ma main dans son cou démêler ses mêches blondes et mon cœur une seconde frémit d’audace.

Devant nous il y a ce petit chemin (qui sent la noisette) par lequel nous sommes arrivés, puis derrière nous, séparé du muret, un impressionnant pré d’herbe claire et virevoltante qui ne cesse de me faire des clins d’œil. Je confesse à Grand Fou qu’il est là mon fantasme, m’allonger seule dans l’immensité, le vert à perte de vue. Il me dit que ce terrain est la propriété de l’école primaire dont appartient également le mur sur lequel nous siégeons, mais que l’on est dimanche et que personne ne s’en rendra compte. Alors il me lance, « tu viens? » et saute le muret, foule de ses pieds l’herbe fraiche. Je ne tarde pas à le rejoindre.

Il n’y a que nous. Que nous dans toute cette verdure presque vierge. Et le vent pour nous chanter ses inspirations. Nous étendons nos bras et nos jambes en position d’ange, comme si on voulait laisser notre trace dans la neige et on reste comme ça, longtemps, dans le silence. Grand moment de paix profonde. J’essaie vaguement d’attraper sa main, faire un début de premier pas, mais je sens que l’occasion est inappropriée, que ces envies là viendraient gâcher l’instant. Alors pendant ce qui m’a semblé être des heures, je ne fais rien.

Je ne me rappelle plus ce qui se passe en transition. Si l’on en vient à changer de décor ou non. La discussion reprend petit à petit, plus détendue. J’arrive finalement à mêler nos dialogues à nos bras, nos étreintes fuyantes. Puis il s’approche de moi et lentement descend la fermeture de ma jupe plissée. Puis mes collants en laine noire qu’il défait en s’y reprenant plusieurs fois. Je ne comprends pas trop où il veut en venir en vue de toute cette timidité qui est loin de nous faire mutuellement défaut mais puisqu’il a pris une initiative je le laisse faire, voir où il souhaite me mener. C’est là qu’il me demande, d’une manière très officielle et d’un ton établi : « tu préfères de dos ou de face parce que moi j’aime pas trop en cuillère… »

Et mes oreilles se mettent à bourdonner, c’est mon portable qui sonne, un appel de ce type à qui j’ai répété maintes fois d’arrêter de m’appeler pour me sortir de mon rêve au moment le plus crucial dans le burlesque, avant d’ouvrir les yeux et reprendre mes esprits, je devais faire une tête d’ébahie et j’aurais voulu poser une question, débattre, me débattre ou profiter des ouvertures qui sait, pas finir sur un "la suite au prochain épisode" alors qu’ils n’ont tourné que le pilote de la série m’enfin….

Voilà, je suis frustrée.
Et interloquée. Comment le songe a-t-il pu prendre cette tournure alors qu’il était le reflet de la plénitude et de la sérénité, hein? Si vite. Après cette nuit avec ce monsieur, je rêve de Grand Fou et je mélange les anecdotes. Mais il n’en démord pas. Placardé contre le filigrane de mes rétines, j’ai beau m’user, me lasser, aller voir si l’herbe est plus verte chez le voisin et ce même en rêve, il est là. Il est avec moi. Dans chacune de mes pensées, mes bulles qui s’échappent. C’est lui. C’est Grand Fou.

C’est lui.


Ecrit par Dine, le Jeudi 6 Octobre 2011, 13:52 dans la rubrique Actualités.