Ecris le 27.06.05 à 23h10
J'ai envie d'écrire, je frétille toute seule.
J'ai beaucoup de choses à exprimer mais je ne sais par où commencer. Je ne sais même pas si j'ai envie de commencer, c'est bizarre.
Ce soir je n'aimerais parler que de choses futiles.

Ca y est, je suis inscrite en BTS. On m'a accepté, j'y suis allée ce matin. Marrant, ces tentatives d'intimidation, dans le bureau du directeur. Ce type a un grain. J'adore. Cash il arrive vers moi pour me serrer la main, s'arrête net, fait la grimace :
-" Ta tête me dit quelque chose..."
Moi aussi j'avais l'impression de l'avoir déjà vu quelque part, mais où? Impossible de m'en rappeler. Pas dans le cadre scolaire en tous cas.

Baratinent-ils tous comme lui? Toutes les écoles se proclament-elles les meilleures de France? Publicité mensongère, j'accuse! N'empêche....c'était très convaincant, j'avoue. Parfois, il m'emportait un peu dans son jeu. Je suis tombée sur un directeur complètement à fond dans la section. Un passionné. Autant investi qu'un professeur. La prof principale d'ailleurs, parlons-en. La première fois, j'ai cru que c'était une élève tellement elle paraissait jeune. Quand elle parle, elle a une petite voix de d'jeuns aussi. On a envie de la tutoyer.
Le dirlo, lui, c'est une flèche, il a la pêche, il vit à cent à l'heure. Faut pas trop lui poser de questions, ni hésiter quand on acquiesce, sinon il s'excite de plus belle. Alors je me contentais de répondre par des "oui" "ok" "d'accord" et des hochements de tête, pour limiter les dégâts, enfin, pour l'instant....

Je n'étais pas la seule à m'inscrire ce matin. On était quatre de la région. Monsieur le dirlo tenait absolument à ce qu'on s'échange les numéros de tel entre nous, pour qu'on se mette dès maintenant au travail afin de constituer carnets de croquis et références, ainsi qu'un panel de possibilités de stage à l'étranger. Primordial, l'étranger. Faut aller ailleurs, disait-il.

En fait, nous ne sommes que 4 sur 18 à représenter le sud.
Etonnant. Déjà que l'idée de me taper bus-métro-bus ne m'enchante guère et que je râle, y'en a qui vont s'amuser à vivre loin de tout. C'est que cette année, il y a eu beaucoup de demandes. Plus de 450 disait-on, dans toute la France, DOM TOM incluses.  Il faut se rendre à l'évidence, j'ai été pistonnée. Un peu malgré moi, certes, mais bon....on ne m'a pas choisi uniquement pour mon talent en la matière. Ce qui fait que des quatre, j'étais la seule nouvelle bachelière. L'une avait fait la fac d'arts plastique, l'autre la mana, et le dernier les beaux arts. Le dernier qui était à mon lycée, l'année précédente. Drôle de coïncidence que de le voir ici. J'étais plutôt heureuse de ne pas être "seule". Il était là, et nous pourrions parler avec nostalgie de nos années lycée. En plus il connaît bien Gourou, Coq, Nem, Poubelle et touti couanti. Ca resserre les liens, pour le coup.
Ils ne vont être que deux hommes pour 16 filles.
Ca va changer radicalement mes repères. Je n'ai plus du tout l'habitude des groupes de demoiselles, vu que dans mes classes précédentes nous étions quatre, cinq au max. Je n'aime pas crêper les chignons, j'espère qu'il n'y aura ni jalousie, ni hypocrisie. Surtout que le gars qui va se retrouver autour du troupeau de femelles en chaleur est un bogoss viril dans l'âme. Pas mon type, mais classe quand même. A mon avis, elles vont se battre entre elles pour ses beaux yeux, c'est moi qui vous l'dis. Beuah tant pis, je resterai célibataire. On va voir combien de temps je vais tenir.

J'ai bien sympathisé avec le directeur de l'établissement en fait. J'ai l'impression que je suis de moins en moins timide (à part en ce qui concerne le téléphone, toujours aussi coincée). Je marchais devant avec le vieux, et déjà on blaguait ensemble. Il s'est retourné pour interpeller deux professeurs qui discutaient entre elles :
-"Ah! Mes chéries..." s'est-il exclamé.
Je n'ai pas pu m'empêcher de pouffer de rire. Il a commencé à s'exciter sur moi(pour la énième fois de la matinée) :
-"  Mais ne ris pas! On s'appelle tous mes chéris dans la mode! Toi aussi tu verras, tu feras pareil!"
Hmmm...j'ai hâte....
Du coup, notre réunion en petit comité était fort enthousiasmante. Personnellement, il m'a mis la niaque. Et puis, on va devoir accueillir et héberger des élèves d'Afrique qui ne parlent pas un mot de français dans notre section, ça va être génial! Pis rien qu'à savoir qu'il y a encore pleins d'autres élèves provenant des 4 coins de la France à découvrir....je palpite de plaisir. Mais quand même, c'est bizarre...
-" Il y a le même  BTS à Paris et autres.....pourquoi les parisiens postulent-ils dans celui-ci alors qu'ils en ont un la porte à côté?"
J'aurais pas dû poser cette question, je savais que SuperDirlo allait une nouvelle fois s'enflammer :
-" Mais t'as pas compris encore....on est les meilleurs! Les meilleurs! Meilleeeeurs!"

Oui bon ça va, pas la peine de me le crier à l'oreille.
(J'ai du mal à assimiler, mais pas à entendre!)
Il prend ses aises ce type, il me prend par l'épaule aussi. Ca y est je suis sa pote. Quand il nous raconte les anecdotes de la section, ça fait sourire, parfois ça effraie. Surtout quand il nous dit que les premières années ont des devoirs à faire pendant les vacances d'été. Horreur! Je veux ma session plage, bordel!
A ce qu'il parait les élèves en fin de BTS ont tous chialé parce qu'ils ne voulaient pas se quitter. Je trouve ça mignon. Ca ne m'est jamais arrivé, ce genre de situation. J'ai toujours eu envie de quitter mes établissements de fréquentation, heureuse de laisser ces gens derrière moi, j'ai rarement eu de remords, ou de regrets. Non, quitter quelqu'un les larmes aux yeux, connais pas. A part peut-être...


....bon, j'ai une anecdote qui me vient à l’esprit mais ce n'était pas le même contexte. C'était différent.
Parce qu'il disparaissait comme bon lui semblait, et qu'il en était totalement indifférent. Parce que j'étais amoureuse et lui pas. J'ai pas pleuré parce qu'il ne serait plus là, j'ai pleuré par injustice. Tiens, d'ailleurs, à l'heure où je vous parle, ça fait longtemps que Maro est parti de l'appartement. 3 semaines, un truc du genre. Il fait sa vie à Grenoble, maintenant. C'est triste?

Je sais pas, je ne m'en rends pas vraiment compte.

Dans sa chambre, tout est à sa place, il n'a rien emporté. Alors je ne réalise pas qu'il ne reviendra plus. Il y a encore toutes ses photos accrochées aux murs. Ses empreintes, sa couverture. Son lit, son odeur. Elle ne partira jamais de cette chambre, son odeur. Quoi qu'on en dise, elle ne s'en ira jamais, elle. Elle est trop forte. Trop imprégnée. Il y a encore du Maro partout, ici. Et j'ai les larmes aux yeux, parce qu'il est loin.

C'est con. Je suis trop con. Il y a trente secondes, je disais que je ne pleurais pas pour tous ces trucs foireux. Que j'étais au dessus de ces petites futilités. Que je m'en moquais de voir les gens partir. Pourtant, lui, il ne reviendra plus.

J'en ai les larmes aux yeux.

Il m'a fallu trois pauvres phrases à écrire. Des souvenirs de sensations. Ca monte tout seul, c'est en train de monter. Je l'ai aimé très fort. Et je ne pourrais plus m'imaginer rendre visite à Poubelle dans la semaine pour le voir. Chanter ses chansons, rigoler, faire le pitre.... Et je comprends qu'il suffise que Poubelle lave ses draps pour qu'il n'existe plus. Et ça me fait chialer, l'idée qu'il ne puisse plus exister. Qu'il s'efface peu à peu, que je continue de m'accrocher fétichiste, à son lit, la fenêtre où il a posé ses doigts, les photos qu'il regardait le soir, avant de s'endormir. Ces photos représentant toutes des êtres chers. Là où je n'y figure pas.

Ca y est, il est finalement parti. J'en avais parlé, en avril, mais j'avais encore du temps devant moi. Et aujourd'hui, je vis mes craintes. C'est bizarre, je n'en avais pas pris conscience avant, pourtant, ça faisait un moment que je ne le voyais plus... Peut-être qu'au fond, j'essayais de fuir la réalité. De croire que ça ne m'affecterait pas.

Ca ne m'affecte déjà plus.

Bizarre, mon coup de blues est passé aussi vite qu'il n'est arrivé. Drôle d'instant à vivre.
La semaine prochaine, Friz revient de son périple avec son père autour du monde. Lui par contre rien n'était prémédité, il est parti du jour au lendemain. Je n'ai même pas pu lui dire au revoir. J'en parlais à l'époque, au tout début de ce Joueb. Qu'est-ce qu'il m'a manqué, lui. J'ai vraiment, vraiment hâte de son retour. J'espère que ça lui fera plaisir de me revoir. Comme il y a longtemps, quand il m'ouvrait la porte de chez Poubelle et qu'il éclatait de joie en me découvrant sur le pallier. Ou encore quand j'annonçais que je venais avec le groupe en soirée et qu'il s'exclamait spontanément:
-"Oh ouuui! Je suis content!"
Quelqu'un qui est heureux de part notre présence, c'est si rare.....ça réchauffe les cœurs...
J'ai plus qu'à attendre la semaine prochaine.

Un de perdu, un de retrouvé.

Comme quoi, tout est relatif.