Des fois on se retrouve au beau milieu de plein de gens, dans un endroit comme d'habitude, on fait pas gaffe à ce genre de chose. On se retrouve là, c'est un nouveau aujourd'hui qui est entamé et là, on crie, on s'exclame tout au fond de soi :
Mais qu'ai-je fait?
Ou ça mène, et pourquoi? Pour s'échapper?
Et on est sûr qu'avec ça, on parviendra à fuir. Fuir l'instant passé, certes. Et les conséquences? Des responsabilités sur nos petites épaules frêles et puis surtout....le poids de la conscience. S'engager pour esquiver le refus. Eviter la souffrance d'autrui pour mieux l'enfoncer après, quand il aura cru pouvoir construire des bases solides, des piliers, une histoire? Sur quelle terre, quel origine?
Ce sont les "je t'aime bien" les pires.
Retrouvaille. C'est un grand mot qui n'a pas pris de sens quand je me suis approchée de lui pour lui faire la bise. 6 mois d'absence.
-" Ca me fait plaisir de te revoir, Dine."
J'ai souri. Puis me suis installée sur le canapé et fais comme si de rien n’était. C'est comme ça. Parfois j'ai vraiment des attitudes à la con.
Ah si, je lui ai dit un truc, effectivement, il fallait que je sorte quelque chose, alors quand j'ai levé la tête pour m'exprimer, je l'ai regardé dans les yeux et :
-" Mais c'est quoi cette coupe de cheveux!?"
...je l'ai fermé, après ça.
Friz avait changé.
Ce n'était plus le gars totalement martiennisé hors planète Terre de l'époque. Il s'était un peu posé, physiquement. Bon, bien sûr, il avait toujours cette tête un peu étrange, intrigante mais pas attirante.....mais il y avait quelque chose d’autre.....la peau dorée au soleil, les traits affinés, il avait mûri. Bon à croquer (c'est même pas vrai en plus). Et puis on voyait vraiment qu'il revenait d'Amérique centrale. On aurait dit le surfeur de base du Costa Rica. Avec ses yeux bleus grand écarquillés et ses longs cheveux blond de paille, séchés par le sel marin, puis son teint hâlé, sa peau lisse...
... C'était un étranger pour moi.
Puis en même temps, c'était toujours Friz, avec ses réactions totalement à l'ouest, ses gaffes à répétition, ses crises de fous-rires et ses idées atypiques.....c'était lui. Pour ça, il n'avait pas changé.
Ni la manière dont il posait les yeux sur moi, d'ailleurs. Attentif à la bête humaine Dine, à contempler et analyser le moindre de ses gestes, comme si elle était objet de foire, où étude scientifique à réactions indéterminées. Il surveillait mes attitudes, quand je changeais de position, me grattais le ventre, parlais avec mon voisin. La moindre anomalie, il la guettait. Et dès que je plongeais mes yeux dans les siens, par hasard, il détournait le regard. Pour dire.....ce n'est qu'une coïncidence s'ils se sont croisés. Il avait toujours été comme ça avec moi. Et j'aurais dû m'en douter. Depuis le début, j'aurais dû m'en douter. Que cette façon de m'observer......n'était pas simple curiosité de sa part.
Ouais, je pensais qu'il m'aimait bien, ouais.
Que je lui plaisais, d'une certaine manière, qu'il n'était pas indifférent. Poubelle m’avait prévenu à l'époque, de toutes façons, dans un ancien article (click !). Il faut que vous le lisiez d'ailleurs, parce qu'il résumait assez bien l'image que je m'étais faite de Friz. Un homme de confiance et sans arrière-pensée. Qui ne cherche pas spécialement non plus, qui prend son temps. Ouais. Qui prend son temps.
J'étais chez Poubelle, avec tous ce monde environnant, et merde! C'était moi qui avait l'impression d'être partie depuis 6 mois. Les gens s'étaient barrés, les meubles avaient changé de place, les cafards totalement infesté l'appartement. Je prends à part Poubelle, on a beaucoup de choses à se raconter elle et moi et puis...il faut que je lui dise...
-" Tu sais.....la lettre, pour Maro. (click puis click !) Ne la lui donne pas, finalement. C'était une idée à la con. Je sais pas ce qui m'a prise cette nuit là, de vouloir l'écrire...."
Et là Poubelle ouvre grand les yeux et s'exclame :
-" Non mais tu déconnes?"
-" Non! C'est quand j'ai fait cette lettre que j'ai déconné!"
Puis elle m'entraîne dans la chambre à Maro, et me désigne de sa main la pièce entière. Je perds conscience quelques moments, j'ai soudain l'impression de ne plus être dans la réalité. Je ne reconnais plus rien d'ici. Plus de posters, plus de commode, plus de feuilles en fouillis, plus de lit.
-" Maro est passé hier récupérer ses affaires..." m’indique t-elle, malheureusement trop tard.
Je hausse le ton, mon cœur s'excite :
-" Oui mais la lettre, tu lui as pas donné, la lettre, hein?"
-" Je l'avais posée dans ses affaires....."
-" Comment ça? Dans ses affaires? Tu devais pas la lui remettre en main propre? Tu l'avais mise où, dans ses affaires, où ça?"
-" Je ne sais pas! Je ne m'en rappelle plus.....dans son meuble noir, peut-être.....j'en sais rien."
Je m'effondre. Au fond, je pensais qu'elle n'arriverait jamais à destination, cette foutue lettre, qu'il ne poserait jamais les yeux dessus.
-" Bah pfff....c'est fait, c'est fait, hein? Y'a rien à regretter.....de toutes façons, tu l'avais écrite pour qu'elle soit lue, non?" rétorque-t-elle avec un ton semi-consolateur.
-" Oui, mais ça fait tellement cliché...."
Poubelle rigole :
-" Puis après il ira la placer dans le petit tiroir du bas, où sont bien rangées toutes celles des autres gagas à fond sur lui!"
-"A la limite, ça me soulagerait.....
....argh, s'il lit, il va vraiment me prendre pour une dingue, amoureuse transie de sa personne!"
-" Si tu crois qu'il le sait pas déjà!" s'exclame-t-elle d'un air évident.
Puis on a commencé à évoquer l’histoire des potes à Maro tombés accidentellement sur mon ancien Joueb(click !). Et on s'est mise à imaginer toutes les possibilités de déformation de mes propos écrits rapportés ensuite à Maro. Et franchement, ça faisait peur.
Alors on a changé de sujet.
J'ai regardé cette chambre encore une fois. Ce carré agencé sans meuble à lui. Cette pièce inconnue. Et j'avais du mal à croire que c'était la même que celle de mes souvenirs. Le bon vieux temps. Poubelle voulait qu'on aille rejoindre les autres.
J'ai posé mes mains sur la tapisserie, me suis collée tout contre, et j'ai reniflé ce mur qui me semblait avant, si familier.
-" Tu sais Poubelle, on la sent plus, son odeur...."
Elle a haussé les épaules et soupiré, pour me sortir une réponse bateau :
-" Bah ouais..."
...et finalement retourner sur ses pas, pour disparaître dans ce couloir sans lumière qui mène jusqu'au salon.
Que pouvait elle me dire de plus.
Commentaires :
Re:
Je t'ai peut-être raconté ça sur msn, effectivement.
Moi c'est marrant, mais il m'émeut cet article (c'est con de s'émouvoir toute seule, franchement). Surtout la fin : " Tu sais Poubelle, on la sent plus, son odeur....", j'ai toujours l'impression de revivre ce passage, avec un gout de déception dans la bouche. Parce que, quelques articles auparavant (click !), j'écrivais pleine d'espoir, des phrases comme celle ci : "Elle ne partira jamais de cette chambre, son odeur."
Pathétique, n'est-ce pas?
Bref, cet article, je ne l'ai même pas écrit en entier. J'étais partie pour dire beaucoup plus de choses, et finalement, je m'en suis arrêtée à moins de la moitié. J'ai oubliée la partie Rouge, et puis celle de Friz....alors évidemment, pour mon prochain texte, on ne va pas comprendre grand chose. En été, tout arrive tellement vite...
Ououah, quelle rapidité de réponse! J'en suis admirative! Attention Mounette, je veux beaucoup de pages, je suis une fervente lectrice de ta prose caligraphiée par tes soins. Et pis contente que ça t'ait fait plaisir, j'avais un peu marqué n'importe quoi, et puis tu as pu remarquer, j'ai une écriture de chiottes...(normal, je suis gauchère...dans le vrai sens du terme)
Moi aussi, j'aurais aimé savoir ce qu'il a pu en penser. Mais j'essaye d'oublier qu'il ait pu lire. Parce que je me fais des scénarios foireux. Et puis que c'était une mauvaise idée. Imagine qu'en déballant les cartons de déménagement, un de ses potes qui étaient venus l'aider tombe dessus, avant même que Maro ne soit au courant...c'est fichu. De toutes manière, c'est fichu. Et ça ne sert à rien, c'était une mauvaise idée...
BiSou Toi!
ryne
Ça devait être une de mes avant-première parce que je connais cette histoire. Pas mot pour mot mais...
J'ai répondu a ta lettre aujourd'hui. Pas encore finit mais j'en suis a ma troisième copie ( on ne rigole pas avec ces choses la!). Juste pour te dire que ça t'arrivera assez vite pi aussi que ça m'a fait plaisir...
J'aimerais savoir ce qu'il a bien pu en penser...