Première partie du récit ici
Seules les lumières des maisons nous éclairent la mer. On se cale sur les gros rochers, j'ai du mal à trouver une position qui ne me griffe pas les fesses. On regarde les vagues et je ne peux m'empêcher de dire que c'est beau. Dommage que les nuages me cachent le ciel étoilé, c'aurait pu être si romantique...
On parle, assis sur la roche, j'adore le bruit de l'écume qui nous accompagne. De temps en temps, Gemey s'appuie sur mon dos, c'est vrai que c'est plus confortable. Il me raconte sa musique, ses groupes, c'est moi qui lui pose les questions. Il me décrit la satisfaction de voir les gens réciter les paroles de ses chansons, pendant les concerts. Alors je ferme les yeux et imagine...moi à sa place. Lui fait part de mes envies et aspirations. Il m'écoute.
On philosopherait presque ensemble.
-" Bon, on va se baigner alors?" me presse-t-il.
-" Arf, il commence à faire froid, je ne sais plus si j'ai vraiment envie."
Il insiste, me traine. Bon OK.
Il se déshabille, avance en premier, descend les grosses pierres. Puis marche dans l'eau, le dos tourné, jusqu'à ce que je puisse moi aussi y entrer, sans pudeur. Il se retourne, sourit. On nage ensemble. Sentiment de plénitude. Conscience tranquille. En fond sonore, les percussions s'élèvent. Les gens, sur une autre rive, ont entamé la session musicale, sans nous attendre. Alors ils ne le savent pas, mais dans l'eau salée, on profite de leurs chants portés par les vents. Il fait encore chaud, et si on regarde à nos pieds, on peut voir les rochers épineux qui se déforment sous les vagues. D'ailleurs, il ne faut pas avoir l'imagination trop fertile dans ce genre d'endroits, ça peut nous jouer des tours. Moi, je me faisais peur toute seule. Mais trop tard, j'étais déjà loin de la rive. Alors mes histoires bizarres de bêtes sous-marines, on essaye vite d'oublier.....et se coller à Gemey au cas où...ça ne soit pas que fabulations.
On commence à se rapprocher du bord, lentement mais sûrement. Mes orteils cognent les caillasses, à tous les coups je saigne. Ca, c'est parce que je ne marche plus droit, à cause de l'eau de mer.
Je ne vous l'avais pas déjà raconté? (click!)? La mer me rend pompette. C'est pas des blagues.
Je ne tenais pas debout, même dans l'eau. Alors Gemey me retenait par les mains, juste derrière. Qu'est-ce qu'on riait, on n'arrivait pas à regagner la rive. Gemey m'agrippait de plus en plus fort, tout en avançant. Jusqu'à me serrer dans ses bras. Même comme ça, je vacillais.
-" Tu veux que je te porte jusqu'à ta serviette?" me demandait-il.
-" Nooon, t'es trop maigre, tu vas te faire mal!"
Je ne calculais plus trop ce que je racontais lorsque je sentis ses bras sous mes jambes. Il veut faire son malin. Il avance, je ne dis rien, mes bras contre ma poitrine, je suis un peu gênée. Je caresse l’eau du pied, au passage. Les vagues s’écrasent contre la pierre blanche, j’espère que je ne subirai pas le même sort. J’ai l’impression d’être une princesse sauvée par son noble destrier, je divague, l’air marin est à consommer avec modération.
Il subit les derniers mètres mais me repose à temps sur la terre ferme. Puis on récupère les serviettes encore humides pour entourer nos épaules. Il pose la sienne au sol afin que je m’installe dessus, en gentleman. Je m’assois en tailleur face à la mer, Gemey se place derrière moi et m’enroule de ses jambes. Je lève les yeux au ciel.
Les nuages ont disparu.
“Wouaouh.”
Lancé-je aux étoiles.
C’est le moment que j’attendais, le spectacle du firmament, au gré des vagues, les mains de Gemey frôlant mon dos.
Je me sens bien. Je n’ai plus peur de la suite. Même si je la connais.
J’en ai envie. Oui, j’aime l’instant où il se serre contre moi, m’embrasse dans le cou. J’aime la façon qu’il a de toucher ma peau, et le silence. Quand il me pousse vers lui pour me sentir contre son torse, d’un coup, il devient l’homme désiré. J’étale ma serviette, on s’allonge. On parle de la nuit en se tenant la main. Il me regarde avec le même pétillement que celui des étoiles. Il a ce sourire qui le rend plein de grâce, empli par la bonté divine. Je ne saurais expliquer ce qu’il se passe.
Ou juste, la tranquillité qui nous soulève plus loin.
Je pose ma tête contre son épaule, ses doigts fins s’enroulent dans mes cheveux.
« Ahem, pardon… Ca ne vous dérange pas si j’éteins la lumière ? »
Nous lance un jeune homme, du haut de sa fenêtre allumée.
On rit, bah non tant pis les étoiles nous éclaireront à la place. J’espère juste que ça ne fait pas trop longtemps qu’il regarde…
D’ailleurs, le temps s’est écoulé, plus d’une heure que l’on est là à bavasser, il faudrait penser à retourner voir les autres.
Alors on plie bagage, je ramasse les serviettes, Gemey me coupe dans mon élan pour me serrer contre lui. On sait jamais, hein, au cas où je partirais en courant… Il essaye de m’embrasser, joue avec mes lèvres, mais je refuse. La dernière fois que quelqu’un s’y est tenté, il n’a attiré que mon dégoût. Alors, je redoute de recommencer. Au fond…j’ai peur de m’être encore trompée de personne. Dans un coin de ma tête, je veux nier certaines évidences, et je crains que l’une d’elles soit le baiser. La sensation.
Pour dire, j’en étais même allée à refuser la bouche de Maro, à l’époque.
Et je regrette encore cette abstention.
J’aurais tellement voulu sa langue, croquer ses lèvres, échanger nos salives, me coller à lui toujours, par un baiser….que je n’ai jamais su mériter.
Je suis lourde, à sans arrêt ressasser la même chose.
Et dire que j’étais en train de recréer ce même schéma ici présent. C’est peut être tout simplement que je ne suis pas prête. Il ne faut pas aller chercher plus loin que cela. Alors Gemey me reprend la main et nous partons ensemble. On longe le chemin, arrive aux escaliers. Je monte une marche, il retient mon bras et m’amène contre lui, tout contre. Il me soulève et me serre plus fort. Alors moi aussi je le soulève, pour m’amuser. Bon, pas trop longtemps non plus, la dernière fois que j’ai voulu faire ma forte, je me suis bloquée le dos. Je n’ai rien dit à personne, évidemment. Trop lâche pour reconnaître mes torts.
On a finalement décidé d’aller faire un tour à la session musique. Mais apparemment, pour eux, c’était l’heure de la pause. On est arrivé, et on s’est mis à glander, comme les autres. Gourou et Papa Noël me réclament une chanson, Gemey va rejoindre plus loin les gars de son groupe.
-« Allez Dine, chante ! »
Aaaah…ce que j’aime quand on me le demande. Même si, pour le coup, je n’étais pas trop inspirée.
Je remarque que je suis souvent les mêmes motifs en matière d’improvisation vocale, parfois j’aimerais aller plus loin. Papa Noël et Gourou chantent avec moi, rythmés par leurs percus. Ils sont épuisés par la session zik de tout à l’heure mais tiennent à jouer avec moi, et ça me touche.
-« On t’a attendu. » qu’ils me disaient.
Et je me rappelle un jour où tous les quatre avec Poubelle on était dans la maison folle à lier, à enregistrer nos folies. La session avait dérivé, j’avais commencé à faire la poule, Papa Noël le groin groin du cochon, Poubelle la basse cour, Gourou râpait le fromage et ce, pendant bien 5 minutes, et en musique s’il vous plait.
Je sais la faire, la volaille, on dirait que je suis née avec ça dans le sang. Peut être parce que c’est ce qu’on est, au fond. Dine une poulette, Papa Noël un gros cochon. Bref.
On s’est éclipsé Papa Noël et moi. Pour parler de choses que les autres ne ressentent pas. Il aime bien penser que j’arrive à le comprendre, parce qu’il manipule l’énergie, plus ou moins comme moi. Alors il croit que comme lui, j’arrive à voir plus loin. C’est peut être juste que je vois autrement.
Enfin….tous ces mots ellipsés. Il me prend pour quelqu’un d’intelligent, parle dans d’autres langages, pour que je perçoive le message de par l’intérieur.
-« Parfois, je ne dis rien. Ca ne sert à rien d’expliquer les choses à ceux qui ne peuvent pas comprendre. Alors je préfère me taire. » me confie-t-il.
J’utilisais beaucoup ce procédé aussi, avant. Comment nous faire avancer nous et les autres, de cette façon ? Même si parfois, quand j’entends des propos si à l’opposé des miens, je me décourage. Occupe le silence. Mais lorsque je rentre dans un débat, il y a toujours quelqu’un pour dire :
-« Houla tention, Dine prend position ! »
Ca doit faire peur.
Je tire le T-shirt de Gemey, il m’encastre contre ses poumons.
Les gens prennent les instruments et rentrent. Tous les deux, on traine. On veut encore profiter un peu de ce moment privilégié. On vadrouille entre les rues sinueuses, bordées de petites maisons authentiques. Puis, arrivés devant le pallier de la porte, Gemey me retient encore contre lui. A croire qu’il a peur de me perdre. Il caresse mon visage, soupire :
-« Pourquoi tu ne veux pas m’embrasser ? »
Je souris.
-« Allez viens, rentrons. »
On passe le seuil de la maison de pêcheur, il y a des gens calés de partout. Affalés aussi bien dehors sur la terrasse que dedans, ne reste que l’étage pas encore exploité par la foule. Gemey et moi montons discrètement les escaliers de la mezzanine, interceptant les lamentations d’un Friz totalement bourré :
-« Les femmes sont toutes des chiennes ! »
Il a bien raison.
Je m’allonge sur le tapis, j’ai un espèce de sourire béat sur la face et mes yeux se ferment tout seul, je plane d’un bonheur éphémère. Gemey s’approche de mon visage, me fixe sans décrocher :
-« Allez, juste un, un petit, et après je t’embête plus. »
-« Si tu y tiens tant… »
Il s’approche de mes lèvres, pose les siennes avec délicatesse. Toute la douceur dans l’échange d’un baiser est ici. Aucun heurt, les corps se meuvent comme s’ils avaient tous deux été polis et courbes, je ferme les yeux à nouveau. Les réouvre, il s’écarte, il est perturbé; les idées s’entassent dans sa tête, moi ce sont les sensations. Il me serre dans ses bras, encore. Nous restons figés, comme l’instant, un peu perplexes, un peu ailleurs. Envie de recommencer, mais…
Les gens veulent se coucher, il faut choisir un lit. Partager la chambre de Nils et Marotte. Gemey me fait de la place sous la couverture, m’entrelace, pose sa tête contre la mienne, ses mains sur mes reins, il ne tentera rien. Même s’il en a envie. Il me laissera dormir, caressant ma nuque pendant la nuit, sans me lâcher, jamais. Puis le réveil se mettra à sonner. Il se tournera vers moi pour m’embrasser sur tout le corps, d’un geste doux et attentif. Pour me réveiller sans me brusquer, avec sa tendresse qui ne cesse de déborder de son être. Un des matins où il fait bon d’ouvrir les yeux, et de se sentir aimée. Ou du moins, appréciée. Cajolée, câlinée, je m’envie. D’être tombée sur un homme si délicat et sensible, de ses yeux bleus qui brillent de gentillesse. De ses doigts qui parviennent à toucher mon âme, et ses bras, à me serrer le cœur. Encore aujourd’hui.
Commentaires :
Re:
...de toutes manières, tu en sauras plus bientôt, avec les articles à venir. Une vie, c'est tellement imprevisible...que finalement, rester avec quelqu'un en devient même une surprise.
Contente que Gemey attire ta sympathie. Je te le prêterai, si tu veux. (non, je deconne...quand même)
Merci de passer...et de laisser un petit mot. Histoire que je m'ennuie pas trop dans mon coin et m'occupe à y répondre.
BiZOo!
C'est beau et en plus, ça me déçoit pas ! ( pas comme l'autre histoire là )
J'ai hâte de lire tes prochains textes, ma chère dine :D
Re:
Tiens, "envite", un mélange entre envie et évite...
Comme si j'écrivais mes textes pour ne pas te décevoir...;)
Merci pour tes petits commentaires, toujours, ça me réjouit. Du coup, je vais essayer de faire vite, pour une fois. Pour rattraper le temps perdus, me rapprocher du présent. J'aimerais bien avancer, et te faire découvrir toutes ces choses qui participent à ma survie...
A bientôt ma Ninou
Re: Re:
Re: Re: Re:
Une scène de film? Wouaouh, ça c'est classe.
Eh bien, merci ma Matou pour tous tes mots, ça me touche toujours autant. Si j'arrive à faire sentir aux autres ce que je ressens, c'est l'essentiel, je crois. T'as vu la photo, elle te rappelle quelque chose? C'était quand on est allée à la plage toutes les deux, avec nos appareils, que t'avais plus de piles et tout, mouarf!
Demain je reprends les cours, j'ai pas vu la semaine passer, zut alors, chuis trop overbookée, comme tu dis, il faut que je dorme!!!
BiZOo ToA!
Re: Re: Re: Re: Re:
Hé, comme mon rêve de la denrière fois!(click !) Prémonitoire?
Pfffuhuhuhu! En tous cas merci, j'y penserai pour la prochaine fois, sait-on jamais, hein!
Zibou
Je ne l'avais pas lu, à l'époque...
c'est tout en finesse, et ça ressemble à ces soirées d'été sur la plage, guitare, feu de camp, quelques bières et des sourires. C'est un peu cliché mais ça me fait penser à ça.
Re:
J'aimerais bien revivre des moments comme celui là. Et même avec la même personne s'il le faut. :)
Je le revois ce décembre... :)))
Feu
Et puis, euh, on dirait qu'il y a un indice sur ta vie actuelle? : "et encore aujourd'hui'. Laisse-moi deveiner... tu es encore avec Gemey? En tout cas, il a l'air bien sympathique, ce ptit gars! :)