Pas besoin de faire un test de QI pour comprendre qu’il est plus doué que la plupart des gens. Il est de ces types qui ont toujours quelque chose de plus, de toutes parts. A chaque fois. Un œil qui voit mieux. Une apnée plus longue. Une ambidextrie. Un cœur qui se régule. Une oreille absolue ? Ah ça il maronne, de pas l’avoir. Il n’aime pas ce qui est inné. Il n’aime pas Mozart. Il est persuadé que tout s’aqcuiert par le travail. S’il est arrivé major de sa promotion en physique, c’est par le travail. Mouais. S’il tient plus de trois minutes sous l’eau, s’il a 14 sur 10 à son œil droit, c’est aussi par le travail ? Faut pas déconner hein. A un moment, il faut savoir admettre que l’on est naturellement doté de beaucoup de choses. Y compris d’un visage fabuleux, d’une voix à couper le souffle. D’une capacité à m’attirer plus haute que la normale…
Assis en tailleur sur le trottoir, pleine vue sur sa bagnole pourrave même plus blanche, il m’a dit qu’il avait lu ma lettre d’amitié que je lui avais balancé à la BS lâchement, avant de m’enfuir sans demander mon reste. Plusieurs fois. Pour comprendre mon inspiration et mon schéma de pensée, à ce qu’il parait. Il s’est tapé des fous rires sur certains passages, c’est qu’il comprend mon humour. Puis il m’a cité des bouts de la lettre, à vrai dire, presque dans son intégralité. C’était impressionnant. J’avoue, en général, quand j’écris un soupçon de mots un peu intimes à quelqu’un, je n’ai jamais de réponse. Mais là, me la prendre en pleine face, comme ça, j’avais l’impression de décoller du sol. J’étais obligée de faire pression sur mes lèvres pour ne pas afficher ce sourire béat à temps plein. Quelqu’un qui relit ma lettre, qui rigole, qui veut comprendre. Et en plus, ça tombe sur Blond.
-« Et puis, ne pas vouloir blesser les autres quite à ce que ça retombe sur soi, j’étais comme toi avant. »
Mais avant, alors. A moins que tu le caches bien. Parce qu’avant, au fond, il s’est passé quoi ?J’aimerais tant tout savoir.
J’ai l’impression que c’est réciproque.
A vrai dire, je sais pas vraiment pourquoi on est là, posés comme des clodos là où on peut, à bavasser sur l’autre dans un but peu précis. Moi j’avais rendez-vous avec mes potes pour manger, ça faisait deux appels qu’ils me titillaient pour se renseigner sur l’heure à laquelle il pourraient finalement arrêter de m’attendre. Alors je leur ai dit de partir tout de suite. Parce que dans ma tête, il était inconcevable que je puisse avoir le courage de dire à Blond : « excuse moi, je vais devoir te laisser ». Lui qui répétait sans cesse « il va falloir que j’y aille ». Totalement contradictoire.
Je lui ai avoué à quel point je le trouvais intéressant, mais que toutes ces barrières de con fini et de pré-selection des gens, ça lui obstruait peut être le meilleur. Au début, il a prétexté qu’en réalité, lancer les pires vannes à tout le monde lui permettait de voir qui lui était compatible ou non, une manière d’aborder les gens, en quelques sortes. Et que de jouer les connards, ça l’amusait. Que plus il était salop, plus il était aimé.
Puis il m’a avoué qu’en vérité, même s’il passait pour le teston de base qui réussissait tout ce qu’il entreprenait même en matière de fille, il était très torturé par le manque de confiance en lui. A sans cesse vouloir plus que ce qu’il n’a, il ne peut qu’être déçu, et se sentir lamentable.
-« Tu sais, la foule me fait peur. Quand je me retrouve serré au beau milieu des gens, j’ai l’impression de n’être qu’une toute petite fourmi parmi tant d’autres, et ça me tétanise. »
Agoraphobe le Blond. Mais pour des drôles de raisons.
-« Et puis, je n’ai eu qu’une petite copine dans ma vie alors question succès auprès des filles, j’en sais trop rien… Et si je ne suis sorti qu’avec elle seule depuis le début, c’est parce que c’est elle, et pas une autre. »
Ca a fait un tour dans mon ventre. Forcément. Ca ne sera qu’elle et pas une autre. Ca ne sera qu’elle….elle…
-« Dine, dis moi, toi, ce qu’il faut que je fasse pour ne pas passer pour un con prétentieux aux yeux des gens? »
Quelle question ! Je rêve, c’est lui qui me le demande ?
Ma foi. Etre lui. Seulement lui. Comme je le vois en ce moment, laisser les gens l’approcher, rire, être pudique et sensible. Montrer qu’il peut aimer et être aimé. Pis j’en sais rien.
-« De toute façon, j’veux me barrer d’ici, y’a rien à faire d’intéressant dans cette région, les gens sont tous cons et ont rien à m’apporter sur le plan musical. »
Bah voyons, chassez le naturel il revient au galop.
-« J’aimerais bien t’entendre jouer de la gratte un jour, quand même. »
-« Houlà, ça sera pas tout de suite ! »
-« Comment ça, tu vas pas me dire que t’es un pudique de l’exibition ! »
-« Ouais mais je suis pas satisfait. »
-« Mais tu veux faire ça plus tard, non ? »
Il me raconte. La fois où à Bercy, la foule s’est levée en osmose avec le chanteur qui, d’une seule main, dictait les gestes de tout un stade, qui leur faisait faire ce qu’il pouvait bien vouloir, et à quel point c’était « orgasmique ». Qu’il en avait des frissons sur tout le corps, et avait « jouïs dans son fut à s’en mettre partout » un nombre incalculable de fois. C’était ça. C’était ça qu’il voulait parvenir à obtenir. Pas des petits trucs minables non, Bercy, et des milliers de gens qui vibrent avec lui sur sa musique.
-« Rien que d’en parler, j’en ai encore des frissons, regarde. »
Il me montre ses bras Blonds, à la perpendiculaire. Jamais vu des poils s’hérisser autant.
-« Quand t’as joué l’arabesque (click !) , ça m’a fait ça aussi. »
-« Quoi, tu t’en es mis partout ? »
-« Non, enfin si…mais pas autant. Roh, et puis c’est qu’une façon de parler, va pas me faire chier avec ça ! Quand je t’ai entendu jouer, j’ai été rassuré de trouver enfin quelqu’un qui avait un semblant de sensibilité artistique. »
Je me suis contentée d’hocher de la tête. C’était un compliment, j’en étais baba.
-« Puis l’arabesque j’ai pas le niveau pour la faire, alors ça m’impressionne d’une certaine manière…t’es meilleure en piano que moi, meurs sur le champ ! »
-« Boah tu sais, la moitié des pianistes de la fac vont devoir mourir alors…parce qu’en vrai, j’ai un niveau de merde. Y’a qu’à voir ma note de pratique individuelle pour ça, y’a plein de gens déjà concertistes qui te font les pires morceaux de ouf, tu peux cent fois trouver mieux ailleurs. »
-« Oui mais toi, tu interprêtes. Quand je t’ai entendu jouer, ça m’a fait un truc. »
-« Oui, bof, je faisais que répéter le morceau, je me suis trompée plein de fois en plus. »
Faut vraiment que j’aprenne à dire merci.
-« C’est pour ça, j’aimerais bien te connaître. D’ailleurs je t’ai recommandé à Truc en disant que t’étais une fille sympa, cool et intelligente. J’ai bien fait ton éloge, hein. »
-« Y’a intérêt, c’est toi m’a foutu là dedans ! »
Blond grogne :
-« Il te plait Truc, au moins ? »
-« Rrrrrooaaah, mais oui ! Sinon crois moi que je ne te laisserais même pas faire naitre une once d’espoir de pouvoir me maquer avec lui. »
-« Bon, c’est chouette. Et puis comme ça, on pourra se voir plus souvent ! »
Je me suis retournée vers Blond, faussement perplexe de sa réaction :
-« Attends, qu’il n’y ait pas d’embrouilles, je ne veux pas sortir avec ton pote uniquement pour pouvoir te voir toi ! »
Il n’y avait pratiquement pas un dixième de vérité là dedans. J’ai même eu l’audace d’ajouter :
-« Pourquoi, c’est pour ça, toi, que tu veux que je sorte avec lui ? »
Il se lève et va jusqu’à sa bagnole, peut-être pour se donner le temps de réfléchir. Et en ouvrant la portière de son épave, me sort la voix hésitante, le regard hypocritement occupé vers ailleurs:
-« C’est peut-être pour ça au début….
…mais après, ce sera pour les bonnes raisons. »
Il me fixe, marque un temps de silence, se gratte la tête comme un gars tout gêné, jette ses yeux vers le ciel.
-« J’ai pas vraiment l’impression d’être clair… »
-« Ah ça, pour être confus, tu l’es. »
-« Tu veux que je te dépose quelque part ? »
Ah merde, c’est comme ça qu’il conclut ? Sur une espèce de phrase ambiguë ? Le lâche, il l’a fait exprès je parie. Mais à dire vrai, il est quand même 17h. Ca fait 5 heures qu’on poirote ici avec le ventre que l’on a discrètement baillonné pour pas l’entendre crier famine. Néanmoins, j’aurais pu rester là jusqu’à la nuit tombée, à discuter de musique comme du futur sort du monde et du but ultime de la vie, à se balancer des petites phrases aux multiples interprétations encore, et encore, et encore…
-« Melie et Corsu m’ont donné rendez-vous à leur local de répète, route des M****s, c’est sur ton chemin ? »
-« Non, mais c’est pas grave. Toute façon tu as bousillé tous mes plans de la journée. »
-« Ah…bah, puisque c’est proposé avec autant de gentillesse et de tact, je monte ! »
-« Me dit pas merci, je vais t’en vouloir. »
-« Alors va te faire foutre. »
-« Merci. »
Finalement, c’est lui qui m’a remercié. Sur le chemin du retour, à l’arrêt d’un feu rouge en pente, le camion devant nous, nous est rentré dedans. La classe. Le conducteur et son passager sont descendus constater les dégats en s’excusant platement à maintes reprises et Blond n’a pas fait le connard pour un sou, il m’a dit de l’attendre là et est sorti aider les deux autres à pousser le camion pour le faire redémarrer avec le sourire, les gens l’ont fortement remercié pour sa bienveillance et moi, j’ai été clouée sur mon siège de stupéfaction. J’en apprends tous les jours.
Lorsque l’on est arrivé au local de répétition du groupe à Melie et Corsu, il n’est pas parti. Il est venu avec moi faire un tour du bâtiment, flâner dans les couloirs, mes potes étaient tous étonnés que Blond se soit donné la peine de venir, c’était un miracle. Il les a pas écoutés jouer pour autant, faut pas trop lui en demander non plus, puis fallait dire qu’on avait débarqué pendant la pause. Blond est retourné à sa bagnole sans vraiment dire aurevoir à personne. Et quand je me suis aperçue de sa non présence, j’ai couru jusqu’au parking, en espérant apercevoir sa voiture. J’ai toqué à sa vitre, il l’a baissé, juste le temps d’esquisser un :
-« Tu t’en va déjà ? Tu veux pas me montrer tes talents de guitaristes avant ?»
Il a soufflé et haussé les épaules en maronnant :
-« Justement, quand je vois tous ces instruments et tous ces musiciens, j’ai une folle envie de rester faire un beuf avec eux ! Mais faut pas, ça fait déjà trop d’heures passées à trainer. »
A trainer ?
-« En tout cas, même si ça ne t’a servi à rien, j’ai été contente de discuter avec toi. »
-« Ouais. On remettra ça un jour, à l’occasion. Salut ! »
Il rigole, satisfait. Remonte la vitre et s’enfuit sans même un signe de la main.
Il a presque failli rester.
Commentaires :
Re: waw
Oh ça va, sa caisse était presque pas entamée, très légèrement la carosserie...mais faut dire, dans l'état où elle était déjà, un peu plus un peu moins, il s'en foutait totalement! (heureusement pour lui d'ailleurs...)
Merci pour ce commentaire, moi aussi j'aime bien ce genre d'anecdotes où tous les mots sont à garder précieusement dans un bout du cerveau parce qu'ils font sens soit dans la plaisanterie soit dans l'émotion. J'aime avoir de longues discussions comme ça avec les gens, parce qu'au bout d'un moment, ils ont toujours envie de t'en dire plus qu'ils ne devraient....et c'est réciproque!
Je suis passée sur ton Joueb quelques fois (il n'a ouvert que depuis peu il me semble) et ce que tu es prolifique! t'as écrit 56475621 articles en une seule journée! Tu dois avoir les doigts tout enflés à force! Il faudra que j'approfondisse ça à l'occasion...
Bisous!
Re: Re: waw
En effet, je viens de me lancer sur Joueb. Ces derniers jours étaient un peu moroses, et je n'avais pas grand chose à faire de mes journées. Alors je me suis dit que je pouvais diffuser mes sombres réflexions, peut-être cela intéresserait-il quelqu'un !
Je suis bien content d'être tombé sur ces sites, tout-à-fait par hasard. Je trouve ça génial de partager ses expériences, heureuses ou malheureuses, et de faire ça plus comme un journal que comme un "blog".
On attend la suite des aventures avec Blond !
Bisous !
Re: Re: Re: waw
Et puis, moi Joueb, j'ai pris l'habitude, je trouve cela tellement plus attrayant qu'un simple journal intime rédigé dans un cahier, enfin, pas pour les mêmes raisons, peut-être... Mais partager son vécu, ça n'arrive pas tous les jours dans la réalité. Les gens sont pudiques. Ici, il y a comme un voile qui se lève.
Les aventures avec Blond arrivent et sont nombreuses, c'est tout ce que je peux me permettre d'ajouter. ;)
Bises!
La question que je me suis posée, c'est: pourquoi lui maintenant? Je croyais que (ton copain et puis l'oubli, ou sinon j'ai râté un truc là... faut que je regarde un peu)...
Re:
Alors, il faut savoir à la base que cet article est la suite d'un autre écrit le 12 juin de l'année dernière (ptain, ça date) http://mangakadine.joueb.com/news/209.shtml
A ce moment là, j'étais célibataire, je venais de rompre avec mon petit ami de l'époque, le bien nommé Jules ici : http://mangakadine.joueb.com/news/205.shtml
Bon, j'espère que j'ai un peu éclairé tes doutes. En ce qui concerne le "pourquoi lui maintenant", haha, si on devait demander ça à chaque personne qui tombe amoureuse, on recevrait un paquet de réponses bizarres!
Blond est intriguant. Très intriguant. Je ne sais pas si j'arriverai un jour à cerner sa manière de fonctionner. Peut-être parce qu'il s'éloigne justement trop de ce qu'on pourait appeler un humain normal. C'est ce qui fait son charme d'ailleurs. Désopilant.
En tout cas, ça fait vraiment plaisir de vois trainer de nouvelles lectrices, ce Joueb a tendance à prendre un peu la poussière... Ca me rebooste. Donne moi le lien de ton blog si tu en as un (malabarprincess?) que j'aille y faire un petit tour!
Merci d'être passée Malabar. Au plaisir.
Re: Re:
Moi je trouve ça trop dla balle!!! Une fois tu m'en parlais cet été quand il avait une cop et que tu savais pas trop quelle relation vous aviez, t'étais déja à fond sur lui...et je trouvais ça déja trop space. Parce que dans la voiture de ta mère tu m'en avais parlé une fois aussi, "gars chelou" "mystique mysanthrope" le mec qui se reclu de la société et tu le dénigrais gentiment en l'admirant peut être au fond. C'est mignon comme destin ce coup là. Je me rapelle que quand j'étais au milieu de tous tes gens que je connaissais pas chez toi, il revenait souvent dans les conversations et dans la façon dont tu aimes le décrire, il y'a des restes de mes impressions sur lui quand je l'imaginais...un mec à part. Il te va bien.
j'te bizoute...;)
Re: Re: Re:
N'oublie pas de me donner régulièrement de tes news, hein! N'oublie pas!
Cet article est en fait la suite de celui écrit en juin, ne te méprends pas. Mais c'est vrai, je me rappelle, au resto u et tous ces gens qui parlent de lui meme quand il n'est pas là, parce qu'il dérange, parce qu'il marque les esprits et fait s'interroger... Merci poulette pour tes mots, ils me réchauffent, et si un instant tu as pu réussir à imaginer Blond tel un mec à part, alors peut-être que tu étais un peu dans le vrai. ;)
bisous!
Re: Re:
Repassage par ici en attendant un nouvel article, bisous.
Re: Re: Re:
J'ai pas trop le temps d'écrire en ce moment, mais je vais me motiver promis, mon nouvel ordi tout neuf va m'y aider, j'en suis sure...
math07
waw
C'est magique comme histoire ! Plein de rebondissements, des heures à causer, j'adore !
Elle est dans quel état sa caisse après le camion?